Belgique : Le nouveau gouvernement fédéral reconnaît le rôle du train de nuit, mais comment le concrétiser ?

Nous avons enfin retrouvé un gouvernement fédéral. Et oui ! L’accord de coalition contient un passage sur les trains internationaux. Ce n’est pas grand-chose, mais il y a quand même quelques lignes, et les trains de nuit y sont explicitement mentionnés.

Nous citons :

– Nous encourageons la coopération européenne dans le domaine du transport ferroviaire afin de multiplier et d’améliorer les liaisons ferroviaires européennes, tant au niveau du transport de marchandises que de personnes. Nous plaidons donc en faveur d’une véritable stratégie européenne pour que le rail devienne une alternative à l’avion. Dans ce contexte, il est crucial que l’aéroport national soit mieux desservi par des connexions ferroviaires internationales. Nous nous engageons également à ce que des entreprises privées organisent des trains de nuit. Le gouvernement s’engage à lever tous les éventuels obstacles techniques et réglementaires au développement des trains de nuit, ainsi qu’au développement de la concurrence ou de nouvelles lignes sur les liaisons à grande vitesse. Nous tenons compte de l’impact sur le trafic ferroviaire national.

– Bruxelles est reconnue en tant que nœud de connexion international et d’interconnexion entre les différentes lignes ferroviaires. Le gouvernement examinera de quelle manière des investissements pourront être planifiés pour élargir la capacité de passage à travers la capitale..

Un accord flou voire contradictoire

Tout d’abord, nous nous réjouissons que le gouvernement reconnaisse l’utilité des trains de nuit en les mentionnant également dans l’accord de coalition, mais pour le reste, l’accord reste flou, voire contradictoire avec lui-même.

A notre avis, le point positif est surtout l’intention de travailler au niveau européen pour faciliter l’utilisation des trains de nuit. Il y a certainement encore du travail à faire à ce niveau. Il est encore difficile de trouver du matériel (voitures-lits et voitures-couchettes) qui puisse circuler partout en Europe. Mais le nœud du problème est que les trains de nuit sont rarement, voire jamais, rentables, ce qui signifie que les opérateurs, dont l’objectif est de faire des bénéfices, n’ont aucune raison de mettre en place des trains de nuit ou de construire ce type de matériel. Même les trains de nuit très utilisés meurent, comme par le passé le Thello entre Paris et Venise (direction très utilisée) ou plus récemment les trains de nuit de SJ au départ de Göteborg.

Le train de nuit devrait être développé par une ou plusieurs parties privées

L’accord de coalition mentionne explicitement qu’ils parient sur des trains de nuit privés, ce qui est étrange car le gouvernement ne peut pas imposer à une entreprise privée de mettre en place des trains de nuit dans notre pays. Ou bien le gouvernement De Wever va-t-il rédiger un contrat OSP (*) à cet effet ? (et donc mettre en place/initier et diriger l’initiative elle-même). S’il ne le fait pas, l’initiative revient aux opérateurs, et non au gouvernement.

Le train à grande vitesse vers/depuis l’aéroport de Bruxelles n’a pas de sens

L’article sur l’aéroport ne concerne pas les trains de nuit, car ceux-ci ne constituent jamais une bonne combinaison avec un avion, mais seulement un substitut à un vol court ou moyen. Personne n’ira à São Paulo en avion et ne prendra d’abord le train de nuit pour Bordeaux afin d’économiser quelques kilomètres de vol. Non, c’est trop fou pour être dit.

Cet article est donc consacré aux trains à grande vitesse, mais s’agit-il vraiment d’une bonne idée ? Un Thalys Eurostar ou ICE met aujourd’hui entre 1:50′ et 2:05′ entre Bruxelles Sud et Cologne, soit une distance de 200 kilomètres. Un arrêt supplémentaire à l’aéroport coûterait une vingtaine de minutes de plus, ce qui fait qu’un TGV coûteux ne permet toujours qu’un gain de temps minime, voire nul, par rapport à un trajet en train ou en voiture. Allons-nous pénaliser tous les passagers des trains en les détournant pendant vingt minutes pour aller chercher des passagers aériens ?

De plus, le problème est le même que pour les trains de nuit : Les TGV en Belgique sont tous des trains commerciaux mis en place à l’initiative d’un opérateur dans le but de faire du profit. Il ne s’agit pas d’un service public. Ils ne sont pas autorisés par l’UE sans un contrat OSP, et un gouvernement ne peut pas exiger un service sans établir un tel contrat et payer une redevance équitable pour cela. Comment le gouvernement va-t-il obliger ces entreprises commerciales à cesser de travailler sous l’aéroport ? Va-t-il reconnaître et subventionner l’Eurostar et l’ICE comme un service public ? Nous sommes curieux de savoir comment ils vont résoudre ce problème. Nous ne pensons pas que cela va se produire, ni que c’est souhaitable sans construire un tout nouveau réseau de TGV.

Bruxelles reconnue comme hub international

Enfin, Bruxelles est reconnue comme un hub international pour plusieurs lignes ferroviaires. Qu’est-ce qu’une telle reconnaissance par le gouvernement peut apporter aux voyageurs ?

Nous pensons que cette reconnaissance serait accordée automatiquement, par le public ! Et non par le gouvernement. Le plus important, c’est que nous puissions prendre des trains à Bruxelles dans toutes sortes de directions. Rappelez-vous : jusqu’en 2000, nous pouvions encore nous rendre directement en Italie, en Autriche, en Scandinavie, à la frontière espagnole, dans presque tous les cantons de Suisse, en Pologne et en Russie, en Slovénie… plusieurs fois par jour tout au long de l’année. Si nous pouvions encore le faire, nous aurions de toute façon été reconnus comme une plaque tournante. Aujourd’hui, à part quelques TGV vers des métropoles essentiellement proches et environ six trains de nuit par semaine vers l’est, nous n’avons plus rien en matière de trains longue distance. Nous ne lisons nulle part comment le nouveau gouvernement va concrètement remédier à cette lacune. C’est la condition sine qua non pour redevenir une plaque tournante. (lire aussi : Ouigo : la fin de tout TGV ?)

L’augmentation de la capacité de transit est plus que nécessaire !

Enfin, nous accueillons avec enthousiasme l’augmentation de la capacité de transit de Bruxelles. C’est un très bon point et c’est absolument nécessaire, tout comme l’est l’augmentation de la capacité dans d’autres goulots d’étranglement du réseau. Avec tout le respect dû au voyageur national, cela profite également au train de nuit qui se retrouve souvent à la fin de la file d’attente à l’heure de pointe (retardée) lorsqu’il est (souvent) retardé à l’étranger.

Nous restons à l’écoute !

*Contrat OSP : un contrat OSP signifie « Obligation service public » : un contrat qui énumère les caractéristiques d’un service public et la redevance payée par le gouvernement à l’entreprise exécutante.

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